Développer de nouveaux leviers d’apprentissage 

 Accompagner le développement des compétences et la cohésion des managers avec la méthode du co-développement  

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Introduction  

 Il est aujourd’hui incontestable que la qualité du management a un impact significatif sur la santé des collaborateurs et la performance des équipes mais également en matière d’attractivité pour l’entreprise et de rétention.  

Un récent rapport de l’Igas (2025) pointe à ce titre un management encore trop hiérarchique et vertical en France où d’importants efforts sont à engager pour tendre vers un management axé sur la reconnaissance, le développement de l’autonomie et des compétences, en comparaison avec d’autres pays européens. Le rapport met en avant l’enjeu de revoir les programmes et parcours de formation, mais également de créer de nouveaux modes d’apprentissage.   

Par ailleurs, plusieurs études mettent en avant les difficultés que rencontrent aujourd’hui les managers dans l’animation de leurs équipes, mais aussi les problèmes de santé psychologiques rencontrés par ceux-ci.  

 Les milliers d’heures passées auprès des managers à accompagner le traitement de leurs situations d’équipes à l’aide de la méthodologie du co-développement nous ont permis d’en dégager de nombreux enseignements, bonnes pratiques et conditions de succès. 

 Au cours de ces années, nous nous sommes inscrits dans une démarche d’amélioration continue de la méthodologie dans le cadre de son implantation au sein des organisations et du retour d’expérience associé.  

Notre approche s’appuie sur la méthode du co-développement professionnel développée par Payette & Champagne qui fait référence dans ce domaine. Nous avons intégré également certains apports de CECODEV, centre spécialisé de référence dans le co-développement en France. La méthodologie (grille et processus de mise en œuvre) a ensuite été adaptée et développée dans une logique concrète et opérationnelle afin de répondre au mieux aux réalités terrain et aux contextes des organisations,  

 Voici ci-dessous les points clés de notre retour d’expérience issus de ces années d’expérimentation au sein des organisations. Ces propos se veulent méthodologiques et opérationnels. L’enjeu est de guider et conseiller les acteurs de l’entreprise qui souhaiteraient mettre en place un dispositif de co-développement au sein de leur organisation. 

 De quoi parle-t-on ?  

 « Le co-développement est une approche de formation innovante, qui réunit un groupe de personnes rencontrant les mêmes problématiques professionnelles. Ce nouveau format utilise l’intelligence collective pour trouver des solutions à des problèmes communs grâce à l’écoute et aux témoignages de chacun des participants. » (UpTogether). 

 

Les vertus du co-développement managérial 

 

Lutter contre l’isolement des managers 

Nous avons (trop !) de réunions pour tout en entreprise mais dès qu’il s’agit de parler de situations rencontrées au niveau des équipes, il existe encore trop peu de temps d’échange (exemple d’une personne qui s’isole, une tension interpersonnelle entre 2 collaborateurs, de difficultés à accompagner un changement, un collaborateur qui rencontre un épisode personnel compliqué…) Sans des temps de partage avec d’autres managers, celui-ci peut vite se trouver fragilisé alors que dans la plupart des cas, il s’agit souvent des mêmes typologies de situations qui sont rencontrées d’un manager à l’autre.  

 Prévenir au plus tôt les situations complexes 

Sans des temps dédiés pour aborder les situations rencontrées au niveau des équipes et les confronter avec d’autres managers en partageant les avis, les expériences et les bonnes pratiques, le manager peut parfois trop tarder ou être tenté de ne pas solliciter l’aide des acteurs internes de la prévention (crainte du jugement, banalisation de la situation dégradée, pensant que la situation va se réguler par elle-même). 

 Favoriser l’ancrage des acquis et les bons réflexes  

Les groupes de partage de pratiques et de co-développement entre managers sont un excellent moyen d’ancrer les acquis des formations et de capitaliser les bons réflexes face à certaines situations types en se détachant de la situation traitée et en dégager des pratiques communes. 

 Renforcer la cohésion managériale au sein de l’organisation  

Bénéficier de temps dédiés entre managers pour évoquer les situations rencontrées ou les préoccupations au niveau des équipes n’a pas de prix ! Ces temps renforcent indéniablement les liens entre managers mais également la posture de la ligne managériale, véritable colonne vertébrale de l’organisation.  

Les conditions de succès  

  • Un groupe suffisamment consistant – entre 8 et 12 personnes sans liens hiérarchiques directs – et constitué toujours des mêmes membres – même si de nouvelles personnes peuvent être intégrées, le groupe doit rester stable.  
  • Des séances d’une durée de 3h-3h30 tous les 3 mois environ avec un réengagement chaque année des membres. Le co-développement doit répondre à un besoin, après une année de co-développement (soit environ 3-4 séances/an) il se peut que les managers aient trouvé leur réponse et soit plus serein dans leur posture d’où l’intérêt de réinterroger régulièrement la participation au dispositif.  
  • Le format présentiel est mieux adapté que le format en distanciel même si ce dernier peut fonctionner en alternant sessions en présentiel et sessions en distanciel.   
  • La méthodologie et le déroulé de séance doit être structurée, au risque de tomber dans des discussions trop généralistes et peu constructives, qui n’iront pas en faveur de l’avancement de la situation évoquée, ni de la dynamique du groupe. 
  • Capitaliser sur les bons réflexes par rapport à la typologie de situation rencontrée, pour aller au-delà de la situation traitée et contribuer à une montée en compétences des participants autour des bonnes pratiques. Dans certaines entreprises, un guide de bons réflexes a pu être élaboré à partir de situations types rencontrées.  
  • Le cadre et les règles de fonctionnement du groupe est un incontournable à respecter, notamment la confidentialité des propos et le caractère anonyme des situations évoquées, la posture bienveillante des membres du groupe à travers l’empathie et la pratique de l’écoute active (la pratique de l’écoute active étant un autre atout majeur du co-développement). Le non-respect de ces principes pourrait en effet mettre en péril le groupe et le succès du dispositif. 
  • L’internalisation du dispositif de co-développement au sein de l’organisation constitue une innovation majeure de notre expérimentation. L’ambition est de développer les compétences en interne, de rendre autonome l’organisation durablement. Dans ce cadre, après une première séance de mise en place du groupe, de sa dynamique et de la méthodologie, un binôme de facilitateurs membres du groupe est identifié (sur la base du volontariat et selon des critères précis) et formé, celui-ci aura la charge de prendre le relai de notre animation et d’assurer le suivi du groupe dans le temps. Il est cependant essentiel que les facilitateurs internes soient suivis et supervisés dans le temps afin de s’assurer de la bonne tenue des groupes et du respect de la méthodologie.   
  • La capacité de la direction/DRH à soutenir la démarche et à encourager les managers en ce sens est déterminante, mais également que le dispositif puisse s’inscrire dans une démarche plus globale de développement managérial et en articulation avec les programmes de formations notamment. 

 Les freins potentiels 

 À la lumière des propos ci-dessus, voici la synthèse des principaux freins potentiels et piège à éviter pour garantir une bonne implantation du co-développement en interne :  

  • Le manque de soutien/valorisation de la direction/RH et de communication envers la démarche et dans le temps, 
  • Le non-respect de la méthodologie et du déroulé des séances, 
  • L’absence de réengagement du groupe chaque année, 
  • Le manque de suivi des facilitateurs par une supervision dans le temps. 

 

Dans un contexte de mutation profonde du travail et des attentes des collaborateurs, le co-développement apparaît comme une réponse innovante et humaine aux enjeux du management. Il contribue à la santé psychologique des managers, à la performance collective et à l’attractivité des entreprises. 

  

Par Jeanne Collin-Vacher, Psychologue du Travail et des Organisations – experte 

Fondatrice d’Écosystème QVT 

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